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Interview croisée : décryptage du recensement agricole

Agri-Agro

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Claude Vivenot, président du comité fédéral de l’agriculture et de l’agroalimentaire et de la Caisse régionale de Lorraine (à gauche), et David Boutillier, responsable de l’agriculture et de l’agroalimentaire à la FNCA.

Claude Vivenot, président du comité fédéral de l’agriculture et de l’agroalimentaire et de la Caisse régionale de Lorraine, et David Boutillier, responsable de l’agriculture et de l’agroalimentaire à la FNCA décryptent les premiers résultats du recensement agricole 2020.

La France métropolitaine compte 389 000 exploitations agricoles, soit environ 100 000 de moins qu’il y a dix ans. Si elles sont moins nombreuses, elles exploitent en moyenne 27 ha de plus qu’il y a vingt ans. L’extension des surfaces est plus marquée pour les éleveurs que pour les exploitations spécialisées en production végétale.

Baisse du nombre des exploitations mais hausse de leur surface : quel modèle agricole se dégage-t-il de ce constat ?

Claude Vivenot. Tout d’abord, nous ne pouvons que déplorer et nous inquiéter de cette baisse de 100 000 exploitations en dix ans. Cette diminution de leur nombre combinée à l’augmentation de leur surface sans oublier le recours accru au salariat (21 % contre 17 % en 2010) montre une évolution du mode d’organisation. Le modèle fondé sur un couple qui travaille 7 jours sur 7 à la ferme est en voie de disparition. Le conjoint a souvent un emploi à l’extérieur, ce qui nécessite de faire appel au salariat qui lui-même a un coût. Il faut donc que la structure atteigne une certaine rentabilité soit par une diversification des productions, soit par une surface plus grande ce que facilite l’utilisation des nouvelles technologies.

David Boutillier. Même si les « grandes exploitations », au sens du recensement, sont indéniablement plus nombreuses (+ 3,4 %), le modèle des petites et moyennes entités avec des capitaux d’origine familiale reste majoritaire. Côté production, des changements s’opèrent. L’agriculteur n’est plus uniquement au service de l’alimentation, il peut aussi devenir un producteur d’énergie renouvelable. Cette diversification, qui peut permettre de garantir la pérennité économique de l’exploitation, est également une contribution de l’agriculteur à la décarbonation, dans laquelle il a, et aura, un rôle de plus en plus important à jouer.

La part des exploitations en agriculture biologique et sous autres signes officiels de qualité ou d’origine ont cru sensiblement. De quoi cette diversification est-elle le signe ?

CV. Sanitairement parlant, toutes les formes d’agriculture sont de qualité et nous avons la chance, en France, d’avoir une agriculture attachée à la qualité de ses productions. Le développement de l’agriculture biologique (multipliée par trois en dix ans) répond à la demande de consommateurs acceptant de payer plus cher et d’exploitants soucieux de supprimer l’utilisation des produits chimiques. Cependant, on observe aujourd’hui que le marché est à maturité sur certaines productions, comme le lait et les œufs. En parallèle, d’autres acheteurs ou les mêmes préfèrent se tourner vers les labels et les produits locaux, porteurs de l’image de l’agriculture française et de ce savoir-faire qui reste un gage de qualité chez nous mais également à l’international.

DB. La vente en circuit court se développe également : un nombre croissant d’exploitations la pratique et la gamme de produits proposés au public s’étoffe. Les motivations des consommateurs attachés à ce mode de distribution sont nombreuses : je veux consommer des denrées proches de chez moi et réduire ainsi mon empreinte carbone ; je veux faire vivre mon territoire et les producteurs locaux ; cela me rassure de connaître le cultivateur des produits que j’achète. La vente directe permet donc de retrouver un sens et une origine aux produits consommés. Cette volonté et ce besoin de rétablir le contact entre l’agriculteur et le consommateur ont connu un gros coup d’accélérateur avec la crise sanitaire qui a mis en évidence la confiance dont bénéficie aujourd’hui le monde agricole : 79 %, + 7 points par rapport à février 2020, selon la dernière étude Ifop (fin 2021).

Le maintien de l’élevage et l’installation des jeunes agriculteurs sont deux des défis majeurs relevés par le recensement. Quel rôle peut jouer le Crédit Agricole ?

CV. L’élevage, notamment bovin, a du mal à être rentable et est décrié en raison des émissions de gaz à effet de serre qui ont des impacts sur le climat, de la volonté de consommer moins de viande. De plus, il requiert une très forte implication de l’exploitant. Ce contexte peut briser des vocations et rompre la dynamique d’installation pourtant nécessaire à notre souveraineté alimentaire. Sans cela, l’Europe importera – et elle le fait déjà – de plus en plus de viande hors Union européenne, produite avec des cahiers des charges bien moins contraignants que les nôtres. Quant au défi du renouvellement des générations, l’objectif est de garder notre modèle et de garantir notre souveraineté alimentaire en nous appuyant notamment sur tous ces jeunes, dont le niveau de formation s’est accru, motivés par l’esprit d’entreprise, l’innovation, l’attachement au territoire et la volonté d’en être acteurs. 

DB. Le Crédit Agricole croit à l’avenir de l’agriculture, quel que soit le mode de production, et nous avons en France la chance d’avoir l’une des plus performantes et innovantes qui soit. Le défi de l’installation est donc crucial pour l’avenir de l’agriculture et la vitalité des territoires. Le projet sociétal du groupe conjugué à l’action quotidienne des Caisses régionales doit permettre d’apporter des réponses aux enjeux de l’agriculture de demain, comme le renouvellement des générations ou les transitions agricoles. Au travers ce projet ambitieux, il y a donc, pour nous, une opportunité de contribuer à la recherche de solutions innovantes, en réfléchissant par exemple à la mise en place d’une plateforme française d’échange de crédits carbone ou à des leviers pour la transmission des exploitations.

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« Agriculture : cultivons l’avenir »

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